L’équipe d’Egypte affronte celle du Sénégal en finale de la 33e Coupe d’Afrique des nations (CAN 2022), le dimanche 6 février. A Yaoundé, les Pharaons visent un huitième sacre. Il offrirait au groupe de Mohamed Salah un amour comparable à celui que les Egyptiens vouent à la génération dorée de Mohamed Aboutreika, sacrée en 2006, 2008 et 2010.
Ils avaient piteusement quitté leur Coupe d’Afrique des nations à domicile. Le 6 juillet 2019, les Egyptiens avaient été éjectés en huitièmes de finale par l’Afrique du Sud. Stupeur et colère s’étaient emparées du Caire et même de tout le pays. Le sélectionneur Javier Aguirre avait été viré, le président de la Fédération égyptienne Hani Abo Rida avait présenté sa démission.
Quant aux joueurs, ils avaient été bombardés de critiques, eux qui s’étaient illustrés durant la CAN 2019 en réclamant la réintégration de leur partenaire Amr Warda, accusé d’harcèlement sexuel.
Un retour en grâce
Après la défaite face au Cameroun en finale de la CAN 2017 et la terne participation de l’Egypte au Mondial 2018 (trois défaites), ça faisait beaucoup pour ses très exigeants supporters. Mais, heureusement pour les Pharaons, la passion des Egyptiens pour le ballon rond et ses stars semble sans limite.
«C’est une équipe qui compte quand même Mohamed Salah et de nombreux joueurs d’Al Ahly et de Zamalek, les deux grands clubs du pays, rappelle Amr Fahmy, journaliste à beIN. Et puis, avec Carlos Queiroz [l’actuel sélectionneur, Ndlr], l’Egypte joue mieux durant les matches à élimination directe qu’elle ne le faisait avec Hector Cuper lors de la CAN 2017».
Pour lui, le couac de 2019 a été pardonné : «L’équipe a vraiment changé. Beaucoup de nouveaux joueurs sont à cette CAN, comme Mohamed Abdelmonem, Omar Kamal, Omar Marmoush, Amr El Solia, Mostafa Mohamed.»
Une analyse que partage Ali Ismail, du site spécialisé King Fut : «Cette génération devient de plus en plus populaire grâce à cette CAN. Pas seulement parce que nous avons atteint la finale (nous l’avions fait en 2017 et personne n’était satisfait de la sélection). Mais aussi parce que pour la première fois depuis longtemps, nous voyons des joueurs de l’équipe nationale égyptienne donner tout sur le terrain et jouer de manière convaincante.»
Le lourd héritage de la génération Aboutreika
Reste que, si les Pharaons font un retour en grâce fracassant, ils n’ont pas encore atteint le degré de popularité de la génération dorée dirigée par Hassan Shehata, sacrée championne d’Afrique en 2006, 2008 et 2010. «La première raison, c’est évidemment le fait que cette équipe d’Egypte-là a remporté trois CAN d’affilée, ce qui ne sera probablement plus jamais réussi par aucune autre nation, estime Ali Ismail. La deuxième raison, c’était leur style de jeu, parce qu’ils nous avaient habitués à un style de football très attrayant/offensif, ce que la génération actuelle n’arrive pas à faire. Troisièmement et c’est le plus important : l’esprit d’équipe. La génération d’Aboutreika était composée principalement de joueurs locaux».
Une génération qui a frustré, voire parfois humilié le Cameroun de Samuel Eto’o et la Côte d’Ivoire de Didier Drogba, ou fait jeu égal avec le Brésil de Kaka et Robinho. «Ce qu’ils ont fait était apparemment impossible sur le papier, poursuit Ali Ismail. Et c’est surtout grâce à leur alchimie sur et en-dehors du terrain qui les Égyptiens les ont tant aimés».
Gagner la CAN 2022 et/ou se qualifier pour le Mondial 2022
«La génération d’Aboutreika est impossible à reproduire, glisse Amr Fahmy. On ne peut pas avoir une autre équipe comme celle-ci. D’ailleurs, les comparaisons se sont arrêtées parce que le public sait bien que chaque génération est différente».
Mais lorsqu’on demande au reporter polyglotte si la génération Salah peut devenir aussi populaire que celle d’Aboutreika, il sourit : «Si on gagne la coupe face au Sénégal, oui !»
Et, dans le pire des cas, Salah et sa bande auront droit à une deuxième chance de conquérir les cœurs, en mars : ils affronteront les Sénégalais en barrages pour la Coupe du monde 2022. Ils peuvent ainsi disputer leur deuxième Mondial de suite. Aboutreika et compagnie n’ont jamais pris part à une seule Coupe du monde, eux…